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Faut-il s’inquiéter pour les rivières Oise et Aisne domaniales ?

Retrait d'un embâcle couché dans l'Aisne, département des Ardennes.
Retrait d'un embâcle couché dans l'Aisne, département des Ardennes.

La plupart des rivières sont non domaniales et relèvent donc de la propriété privée. Historiquement, seules les rivières navigables ou flottables, du fait de leur utilisation pour le transport, étaient domaniales (propriété de l’Etat). Pour éviter tout risque d’interprétation, la liste des rivières domaniales de France est désormais arrêtée. Sur le bassin Oise Aisne, seules les rivières Oise et Aisne sont domaniales sur une partie de leur cours. Elles sont navigables, pour l’Oise depuis la Seine (78) jusqu’au Plessis-Brion (60) et pour l’Aisne depuis l’Oise jusqu'à Condé-sur-Aisne (02) et entretenues par VNF. Plus en amont, la navigation quitte le cours d’eau et rejoint un canal latéral. Les deux canaux (latéral à l’Oise et latéral à l’Aisne) sont alimentés en eau par des prélèvements sur les rivières voisines, de sorte que celles-ci sont toujours domaniales au vu de leur intérêt stratégique, sans pour autant nécessiter de travaux d’entretien poussé pour assurer la navigation et le nécessaire tirant d’eau.

Dès la création de l’Entente en 1968, celle-ci et l’Etat conviennent d’une maîtrise d’ouvrage partagée sur ces rivières Oise et Aisne domaniales non navigables pour aboutir assez vite à une maîtrise d’ouvrage unique assurée par l’Entente, puis à un abandon des financements de l’Etat, celui-ci renvoyant aux aides de l’Agence de l’eau. Ainsi et depuis une quinzaine d’années, l’Entente procédait à un entretien courant de ces 250 km de rivières, améliorait la ripisylve, diversifiait les milieux, luttait contre la prolifération des plantes invasives et créait quelques frayères, le tout avec l’aide de l’Agence de l’eau et ponctuellement de la Région Hauts-de-France. Les travaux coûtaient entre 300 000 et 600 000 € suivant les années, dont environ 40% apportés par les six conseils départementaux membres de l’Entente interdépartementale.

Mais la compétence GEMAPI et la perte de la clause de compétence générale des départements a conduit l’Entente à évoluer en syndicat mixte ouvert à la carte (l’Entente exerce certaines compétences, pour ses membres, ceux-ci ne financent que les compétences transférées). Dans cette nouvelle configuration, l’Entente ne dispose plus de ressources à consacrer à des travaux pour lesquels elle n’est pas compétente, sur des rivières qui sont la propriété de l’Etat.

Dès 2017, l’Entente a alerté les préfets concernés (Oise, Aisne, Ardennes) qui ont décidé de reprendre la gestion de leur domaine en propre mais, faute de moyens humains et de connaissance du terrain, ont demandé à l’Entente d’assurer une prestation de maîtrise d’ouvrage déléguée pour la gestion sélective des embâcles.

Si ces travaux sont dorénavant intégralement financés par l’Etat, le volume de travaux s’est très sensiblement réduit pour s’établir aux alentours de 15 000 € pour 2018. Convaincue qu’une gestion minimaliste va avoir pour conséquences, en peu d’années, une fermeture du milieu et une prolifération de la végétation rivulaire puis des embâcles, tandis que les ambitions européennes invitent à améliorer sensiblement la qualité des milieux aquatiques, l’Entente vient de transmettre aux trois DDT une note de présentation de ce qui devrait être un niveau d’intervention ménageant l’avenir. Une somme d’environ 200 000 € est estimée nécessaire à cet effet. Il convient aussi d’envisager les moyens humains (maîtrise d’œuvre, direction des travaux, parcours pour inventaire et suivi, gestion des marchés publics) pour décliner un tel programme.

En 2019, l’Entente assurera pour la seconde et dernière fois une mission de maîtrise d’ouvrage déléguée pour une campagne minimaliste de gestion des embâcles, en espérant que l’Etat reprenne un rythme plus adapté à partir de 2020, alloue les crédits nécessaires et déploie des effectifs en conséquence. Nous sommes désormais dans l’attente de son positionnement.