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Vers la compétence GEMA

Le Pays noyonnais transfère la compétence GEMA à l'Entente.

Depuis la mise en place de la GEMAPI, les syndicats préexistants se sont réorganisés en précisant, par révision de leurs statuts, leurs missions à l’aune des items de cette compétence. Sur une part importante du bassin de l’Oise, les anciens syndicats intercommunaux devenus syndicats mixtes fermés se sont positionnés sur la compétence GEMA (gestion des milieux aquatiques). L’Entente, historiquement positionnée sur la maîtrise d’ouvrage des travaux de lutte contre les inondations, a privilégié les adhésions des EPCI au titre de la prévention des inondations (PI) en quête de la recomposition de la solidarité de bassin.

 

Après cinq années de restructurations, l’Entente aborde un nouveau virage en recevant la compétence GEMA d’un EPCI pour une zone « blanche » (non couverte par un syndicat) et d’un syndicat, ce qui emporte sa dissolution.

 

Fin décembre 2022, la Communauté de communes du pays Noyonnais a délibéré pour transférer la compétence GEMA (les items 1, 2 et 8 de la GEMAPI) à l’Entente pour l’est de son territoire et le Syndicat du bassin de la Verse a délibéré pour transférer la même compétence à l’Entente. Le syndicat alors sans compétence sera prochainement dissous et l’ensemble de ses actifs (personnel, matériel etc.) sera intégré à l’Entente.

 

Cette restructuration fait suite à de longs échanges avec l’Entente sur son offre de services, qu’elle a affiné à cette occasion pour répondre au mieux aux attentes locales. Notamment l’engagement à procéder à un programme d’entretien pour un coût maîtrisé grâce à la mutualisation des charges a emporté les décisions.

 

Le Comité syndical de l’Entente a à son tour approuvé ces adhésions et transferts de sorte que les services devraient être opérationnels dans le courant du deuxième trimestre.

Jean-Michel Cornet, directeur des services, nous en dit plus.


Entente Oise-Aisne : Pourquoi proposer cette compétence à la carte tandis qu’il existe une offre de syndicats de proximité ?

J-M C. : Tout d’abord, l’Entente interdépartementale exerçait cette compétence avant la GEMAPI puisqu’elle entretenait et valorisait les rivières Oise et Aisne dans leur partie domaniale non navigable soit 250 km de cours d’eau sur trois départements (Oise, Aisne, Ardennes) pour un budget annuel d’environ 600 000 €. Et les agents qui s’en occupaient sont encore dans l’effectif. Ce n’est donc pas un sujet nouveau pour notre collectivité.

Ensuite, c’est dès la rédaction des statuts « gemapiens » que l’Entente a proposé tant la GEMA que la PI à la carte, pour offrir à des territoires une structuration à défaut de solution locale, la couverture des syndicats présentant, à l’époque, de nombreuses « zones blanches ». Toutefois le président de l’Entente, M. Seimbille, insistait pour donner la priorité aux acteurs locaux en matière de GEMA. Notre but premier était de reconstituer l’éclatement de la solidarité de bassin en matière de lutte contre les inondations : les six départements qui assuraient une couverture quasi-complète du bassin se retrouvaient dessaisis au profit d’environ 70 EPCI dotés subitement de la compétence PI. C’est donc assez logiquement que la compétence GEMA s’est structurée autour des syndicats de rivières historiques là où il en existait, certains procédant d’ailleurs à des extensions de périmètre pour couvrir parfaitement leur sous-bassin.

 

EOA : En quoi l’offre de l’Entente diffère de celle des syndicats en matière de GEMA ?

J-M C. : Nous faisons le constat général que l’entretien de cours d’eau est assuré de plus en plus difficilement. Avant la GEMAPI, un syndicat recevait 65% à 80% de subvention pour entretenir les cours d’eau (40% de l’Agence de l’eau, 25% de l’Entente et parfois 15% du Conseil départemental). Aujourd’hui, les aides se tarissent : depuis la Loi NOTRe, les conseils départementaux ne peuvent plus aider les communes et leurs groupements que pour leurs « projets » (article L1111–10 du CGCT), comprenez les investissements, de sorte que l’entretien, considéré comme une charge de fonctionnement, ne peut être aidé. L’Entente Oise Aisne, qui apportait un soutien sur financements départementaux, n’a pu préserver ses aides pour la même raison. Enfin, l’Agence de l’eau concentre ses moyens sur les actions de valorisation des milieux et son aide à l’entretien est à la fois conditionnée et plafonnée. Les syndicats doivent donc envisager d’auto-financer l’entretien de cours d’eau et dégager des ressources qu’il est parfois difficile de justifier auprès des membres, notamment parce que les propriétaires riverains n’ont pas été dessaisis de leur obligation d’entretien issue du Code de l’environnement.

Notre offre s’appuie sur le fonctionnement « classique » d’une collectivité : les ressources permettent de fonctionner (donc pour la GEMA, procéder à l’entretien des cours d’eau) et, avec la soulte, des projets d’investissement sont possibles (donc pour la GEMA, valoriser les milieux aquatiques, notamment en partenariat avec l’Agence de l’eau via ses contrats eau et climat). Cette perspective a trouvé un écho favorable sur le territoire du Noyonnais.

 

EOA : Mais faire plus d’entretien, avec peu ou pas d’aides, n’est-ce pas plus cher ?

J-M C. : L’Entente est un syndicat mixte aujourd’hui composé de 32 collectivités. Ses statuts prévoient la mutualisation de la charge de fonctionnement des services. Ainsi les personnels dédiés à la compétence GEMA sont financés par tous de sorte que les cotisations perçues pour cette « carte » sont dédiées en quasi-totalité au financement des travaux. C’est d’ailleurs ce même principe de mutualisation qui a rendu l’offre de l’Entente en matière de ruissellement tout aussi attractive.

La Communauté de communes du pays Noyonnais s’en est bien rendue compte puisque l’Entente propose de couvrir l’ensemble de son territoire (hormis 4 communes sur le bassin de la Somme) pour une cotisation équivalente à ce qu’elle honore aujourd’hui pour le seul syndicat de la Verse. Ce constat peut d’ailleurs être formulé ailleurs puisque tout syndicat doit disposer de moyens, notamment administratifs (secrétariat, comptabilité, finances, marchés, gestion des assemblées, ressources humaines etc.) qui sont répartis sur peu de membres (en général 3 à 5 EPCI). Grâce à une large assise géographique, les services de l’Entente mutualisent ces postes administratifs et en répartissent le coût sur 32 collectivités, c’est extrêmement efficace.

 

EOA : Certes, mais l’on reproche souvent à l’Entente, dont les services sont basés à Compiègne, d’être éloignée du terrain…

J-M C. :  La compétence GEMA nécessite une présence locale de tous les jours. Nous allons progressivement recruter des techniciens de rivière qui seront installés dans des locaux que nous allons louer à proximité du lieu d’exercice de la compétence. C’est l’occasion pour les services d’initier un « maillage » du territoire pour répondre au mieux aux attentes locales. Je souligne que le besoin de proximité existe aussi pour la compétence ruissellement mais la présence locale n’est pas requise au quotidien de sorte que les trajets depuis Compiègne, si ce n’est pas optimal, sont supportables. Disposer d’autres locaux permettra aux agents de se répartir en fonction de leurs aspirations personnelles et la parfaite exécution de leurs missions. Assurément, le déploiement de la GEMA sur le Noyonnais fera date dans l’histoire de l’Entente.

 

EOA : Les études de gouvernances, réalisées dès 2017 pour préparer la GEMAPI, ont été conduites sur des périmètres de bassins hydrographiques. En ciblant les EPCI, l’Entente perd ce périmètre…

J-M C. : Ce serait effectivement paradoxal, qu’un établissement de bassin n’exerce pas ses compétences sur des bassins versants. Sur le Noyonnais, le territoire se subdivise en deux grands secteurs : le long de l’Oise domaniale (gérée par l’État), l’est Noyonnais est drainé par plusieurs cours d’eau dont le plus significatif est certainement le ru de Grandru sur lequel l’Entente a déjà agi lors des inondations d’Appilly. A l’ouest, c’est le bassin de la Verse que l’Entente va gérer en totalité par adhésion du Syndicat du bassin de la Verse. Enfin, la CCPN est concernée par 4 communes du bassin de la Divette et reste membre du syndicat qui gère cet affluent, de sorte que la limite de compétence sera bien, en pratique, une ligne de crête. J’ajoute, puisque l’on parle de la Verse et du ru de Grandru, que ces affluents renvoient dans l’actualité à des problématiques d’inondation (orage sur la Verse des 7 et 8 juin 2007, même événement moins médiatisé sur le ru de Grandru notamment à Mondescourt, inondations d’Appilly en 2020 et 2021 rechéries par les apports du ru de Grandru). En disposant de la totalité de la compétence GEMAPI, et peut-être à terme de la compétence ruissellement, l’Entente dispose d’une véritable force de frappe et des moyens conséquents de l’ensemble de ses membres. Au travail !