· 

Et si la crue de 1910 se reproduisait ?

Cette question revient souvent et renvoie à une montée des eaux très importante de la Seine. On se réfère immédiatement aux nombreuses images disponibles, souvent sur cartes postales comme celle ci-contre. Si la crue avait gagné de larges territoires de la région parisienne, il nous faut relativiser les conséquences de l’époque. En effet, la vie en 1910 était toute autre. L’électricité a été largement déployé en France aux alentours de 1920. La France ne comptait que 180 000 abonnés au téléphone. Le réfrigérateur (le "frigo") domestique est apparu en 1925 et la télévision a émis à partir de 1937.

Ainsi, les images de 1910 qui nous sont parvenues résument très bien les contraintes de l’époque : il s’agissait essentiellement de problématiques de déplacement, tant des populations que de l’acheminement de biens. Mais les réseaux étaient balbutiants voire inexistants de sorte que la vie était relativement peu perturbée par rapport à ce qui se produirait aujourd’hui.

Les dommages "modernes" d’une crue n’ont aucun point commun avec ceux constatés lors des crises plus anciennes. En particulier, la zone perturbée s’est considérablement étendue du fait de la défaillance des réseaux. Consulter une carte de zone inondable, qui est le premier réflexe lorsqu’on parle d’inondation, est très loin de résumer la situation. Car d’autres cartes, d’une toute autre physionomie, renseignent sur le préjudice concret qui nous attend : carte des défaillances électriques, des ruptures de distribution de l’eau potable etc.

Dans un passé plus récent, l’on peut se poser la même question pour la crue de décembre 1993 sur l’Oise. Aujourd’hui, nous sommes tous dépendants d’internet. Mais rappelons que 1993 est aussi l’année de l’invention du premier navigateur sur le web... De sorte que la fragilité des réseaux de télécommunication a pris une dimension qui était inexistante lors de la crue significative et pourtant récente à laquelle tout le monde pense sur ce territoire.

C’est pourquoi toute référence à une crue passée pour se projeter sur ce que serait une crue d’aujourd’hui est une démarche erronée qui conduit à une sous-estimation des dommages. Le PAPI de la vallée de l’Oise, dont le dossier de candidature est en cours d’élaboration, prévoit notamment d’écrire le scénario d’une crue d’aujourd’hui au vu de l’organisation de notre société à l’instant présent, et c’est un exercice complexe d’anticipation.